Draft 2008: Michael Beasley vs Derrick Rose : Qui sera le n°1 ? Posséder
le premier choix de draft signifie pouvoir choisir un joueur parmi les
plus gros espoirs qui se déclarent prêt à faire le grand saut en NBA.
Imaginez qu’on vous ouvre les portes de la plus grande pâtisserie du
monde, que s’étalent devant vous des dizaines d’étalages surchargées de
douceurs confectionnées par les plus grands maîtres et qu’on vous
propose d’en prendre une. N’importe laquelle. C’est un peu à ça que
seront confrontés les dirigeants de la franchise qui aura décroché le
premier choix de draft. Eux aussi baveront devant ce qui leur sera
offert, chancelant devant la multitude de possibilités et hésitant
devant chacune des friandises présentées.
Le premier choix de
draft peut parfois être la première pierre de l’ascension au sommet
d’une franchise (Tim Duncan, Shaquille O’Neal, Hakeem Olajuwon, Lebron
James en sont de bons exemples) mais encore faut-il choisir le joueur
qui sera effectivement capable de porter son équipe jusqu’à ces
sommités. Cela n’a pas toujours été le cas. Kwame Brown, Michael
Olowokandi et d’autres portent encore les marques de ces espoirs déchus.
Deux
joueurs aiguisent plus que d’autres les appétits des Generals Managers.
Le bestial Michael Beasley et le Robin des Bois des parquets, Derrick
Rose.
Michael Beasley a longtemps été considéré comme l’unique
candidat au premier strapontin. Cet ailier fort de 19 ans est
certainement le plus grand attaquant parmi les joueurs disponibles et
peut-être même, parmi une grosse partie du contingent NBA. Il peut
scorer de n’importe où après la ligne des 3pts, quelque soit
l’opposition qui lui fait face (prise à deux, à trois), et cela avec
une facilité déconcertante. Il a fait exploser tous les compteurs en
NCAA alors qu’il ne s’agissait que de sa première année à ce niveau.
Cependant,
de plus en plus d’observateurs pensent le meneur de Memphis University
capable de lui ravir la première place. En effet, Derrick Rose a mené
son équipe en finale du tournoi NCAA avec un brio qui en a soufflé plus
d’un, allant même jusqu’à chambouler les plans de certains.
Voilà
les armes que vont user ces deux joueurs lors de ce duel. Une
effrayante aisance à scorer d’un côté contre une impressionnante
capacité à élever le niveau général de son équipe de l’autre.
Beasley
est absolument inarrêtable en attaque. Quoiqu’il arrive, il marquera au
minimum une vingtaine de points et cela n’importe comment, de n’importe
où (sauf à 3pts même s’il peut devenir une menace à cette distance). A
19 ans, son physique, fabuleuse combinaison d’envergure, de jump, de
vitesse et de puissance font déjà suer bon nombre de NBAers. La
désormais ancienne terreur de Kansas State ajoute aussi à ces qualités
de marqueur une capacité exceptionnelle à prendre des rebonds,
notamment offensifs (4,0 par match).
Comme si cela ne suffisait
pas, il possède une très grande confiance en lui et fait preuve d’une
agressivité hors du commun (jusqu’à en devenir intimidant paraît-il).
Ces caractéristiques constituent une vraie assurance quand à sa
capacité à s’imposer dans la ligue.
Son impact immédiat en NBA
ne fait aucun doute, cependant, quelques zones griffonnées au feutre
rouge émaillent les rapports des scouts à son sujet.
Certains
pensent que sa taille s’approche plus des 6 pieds 8 pouces (2,03m) que
des 6-9 annoncés (2,06m). Cela peut-être gênant face à certains joueurs
de grande taille comme Nowitzki ou Garnett mais son talent (et sa
confiance en lui) est de taille à se mesurer à ces Goliath. En réalité
des observations beaucoup plus graves figurent sur son casier
basketballistique.
Comme l’on peut s’y attendre d’un joueur
capable de marquer chaque fois qu’il touche le cuir, Beasley est un
joueur individualiste. Même avec deux ou trois joueurs accrochés à ses
épaules, il choisit systématiquement le shoot plutôt que servir un
joueur ouvert. En NCAA, il parvenait à ses fins, mais il n’en sera pas
toujours de même en NBA. D’ailleurs, de façon générale, il a plutôt
tendance à prendre de mauvaises décisions.
Dans cette situation,
deux possibilités : soit il persiste, marquera ses vingt points à un
pourcentage moyen et perdra le match avec la même régularité, soit il
prend du plomb dans la tête, comprend que dans certains cas, il est
plus efficace de faire une passe et à ce moment-là, Beasley deviendra
un joueur littéralement instoppable. Et oui, peut-être que certains en
doutaient encore, mais le talent et le physique ne font pas tout. Nous
y reviendrons.
Autre gros point noir, la défense. Le petit
Michael a les capacités physiques pour être un bon défenseur,
seulement, il ne fait pas les mêmes efforts en défense que ceux qu’il
déploie en attaque. Ceci impliquant cela, son niveau de ce côté du
terrain est à peine correct.
Mais en réalité, la majorité des
inquiétudes des observateurs se concentrent sur son attitude. Comme
souvent lorsqu’il s’agit de joueurs très talentueux, Beasley
collectionnent les critiques sur son éthique de travail et sa volonté
d’être meilleur. D’ailleurs, sur le terrain, il fait parfois preuve de
déconcentration et peut même paraître fainéant.
Cela est souvent
le cas pour les joueurs très doués pour qui le jeu paraît si facile
qu’ils s’autorisent ces quelques vagabondages et se permettent de ne
s’appuyer que sur leur talent, sans jamais le forcer.
Il a
hérité de ce manque de maturité une réputation de joueur indiscipliné
et incoachable mais quelques signes d’amélioration laisse entrevoir un
avenir un peu plus doré (de quel côté de la force va-t-il tombé ?).
Ce
manque de maturité peut être dépassé (notamment par la bienheureuse
intervention d’entraîneurs ou de vétérans aux moyens de quelques coups
de pieds bien senti et bien placés). Si cela est le cas, Beasley peut
devenir l’un des ailiers forts les plus dominants de la ligue, si ce
n’est le plus dominant.
Je n’ai pas fini. A l’heure où San
Antonio et Detroit font peur années après années, où Steve Nash a été
deux fois MVP et où Kobe Bryant a du attendre de faire jouer ses
coéquipiers pour recevoir cette distinction, Beasley ne paraît pas être
capable d’élever le niveau de jeu de ses partenaires (élimination
rapide de son équipe au tournoi NCAA). Pire encore, sa mentalité
individualiste est peut-être calculée. En effet, comment peut-on
expliquer qu’un tel phénomène ait choisi la moyenne faculté de Kansas
City ? Certains disent que c’est pour qu’il puisse amener au succès une
équipe de faible standing. Si c’est le cas, c’est un échec.
D’autres,
beaucoup plus cyniques, pensent que Beasley a agit ainsi afin d’être la
pierre angulaire de l’équipe sans qu’aucune contestation ne soit
possible et qu’il puisse ainsi briller tranquillement (entendez faire
des stats) avant de faire le grand saut en NBA.
Prendre Beasley,
c’est s’assurer 25 pts et 9-10 rbs de moyenne en carrière mais cela ne
signifie pas que ces stats s’accompagneront d’une bague de champions.
Si beaucoup d’espoir pèse à juste titre sur ce grand gaillard de 19
ans, un spectre se dessine sur un mur au fond de la salle. Celui de
Derrick Coleman.
Derrick Rose est un peu l’anti-thèse
de Beasley. Si le « Sentenza » de Kansas State se démarque par ses
qualités individuelles, Rose, lui, se distingue par sa capacité à avoir
un vrai impact général et bénéfique sur son équipe.
Au-delà de
ces incroyables qualités athlétiques (pourquoi croyez-vous que le boss
de la NBA, David Stern, pense de plus en plus à organiser des matches à
ciel ouvert ?), le joueur de Memphis est d’ores et déjà un véritable
meneur de qualité. Il sait diriger une équipe, rendre meilleur ses
partenaires, possède une excellente vision de jeu et prends souvent les
bonnes décisions. La totale, quoi.
Cela est d’autant plus
impressionnant lorsque l’on sait que ces caractéristiques n’étaient pas
présentes dans les rapports des scouts deux ans auparavant. Cette
aptitude à progresser, simplement expliquée par le fait qu’il montre
une vraie volonté d’apprendre et qu’il est à l’écoute de ses
entraîneurs, est une des particularités qui font de lui un joueur sur
lequel on peut compter tant pour le présent que pour l’avenir.
D’ailleurs, cette capacité à progresser s’exprime dans tous les aspects
de son jeu.
Toujours dans ce sens, Rose fait preuve d’une très
bonne attitude en général, mais particulièrement sur le terrain. S’il
n’est pas très vocal, la sérénité qu’il dégage (qualité essentielle
pour un meneur) combiné à l’intensité permanente dont il fait preuve
font de lui un parfait leader par l’exemple.
A cela, on peut
ajouter qu’il fait partie de cette catégorie très prisée de joueurs
décisifs qu’on appelle clutch players. En effet, Rose a démontré qu’il
pouvait élever son niveau de jeu lorsque l’adversité l’y obligeait et
qu’il ne craignait pas de se charger des possessions dans le crunch
time.
Toutes ces qualités font de lui le parfait meneur-leader
dont rêvent tous les coachs et sur lequel on peut construire une équipe
taillée pour le titre.
Mais cela n’est pas tout. Rose,
contrairement à Beasley, est un défenseur acharné capable de
littéralement annihiler son adversaire direct comme il l’a fait pendant
le tournoi NCAA face à des meneurs cotés comme Darren Collison, ou D.J.
Augustin. Lorsque l’on connaît l’importance des meneurs dans n’importe
quel dispositif, cette capacité peut s’avérer des plus décisives.
Son
intensité est d’autant plus admirable qu’il la délivre des deux côtés
du terrain. Ses qualités athlétiques qui lui permettent de se frayer un
chemin jusqu’au panier, et ses talents de finisseur font de lui une
menace offensive permanente qu’il ne faut en aucun cas négliger. Très
bon scoreur à proximité du panier, il doit quand même progresser aux
shoots à plus longue distance. Cependant, étant un joueur intelligent,
il sait minimiser sa faiblesse et ne prend la plupart du temps que des
tirs ouverts ou, alors, il profite des période où il est en rythme dans
cet exercice.
Plutôt grand (1,91m), il peut poster n’importe
quel meneur, cependant, sa puissance et son intensité font que sa
technique est souvent sous utilisée (et donc moins abouties). Ces
atouts-là qui lui permettaient de dominer son vis-à-vis en NCAA
pourraient ne pas être suffisants en NBA. Mais, sa capacité à
progresser laisse supposer que cette carence, comme le shoot, sera
rapidement gommée.
D’autres aspects du jeu doivent encore faire
partie de ces objectifs de progression. Il doit encore apprendre toutes
les subtilités du poste de meneur notamment l’exécution du système
vedette en NBA, le pick-and-roll. Aussi, Derrick Rose semble être moins
efficace sur jeu posé, sur demi-terrain que sur un jeu up-tempo. Le
coach qui le sélectionnera devra avoir ça en tête lorsqu’il établira
ces plans de jeu.
Enfin, Rose a parfois la mauvaise habitude de
se laisser porter par le jeu et il ne domine pas autant que ce que lui
permettraient ses qualités.
Agé de 20 ans seulement et son
attitude aidant, il est capable de surmonter ces lacunes et de devenir
ainsi l’un des meilleurs meneurs de la ligue. Mais surtout, Rose est
potentiellement le type de joueur capable d’amener son équipe au succès
final (il a presque réussi avec Memphis en ne s’inclinant qu’en finale
face à Kansas University après avoir éliminé Texas et UCLA). Dans
l’hypothèse la plus pessimiste, il restera un meneur titulaire de
qualité porté par ses qualités athlétiques et son altruisme.
Ces
deux joueurs diamétralement opposés seront certainement premier et
second de la draft 2008. Cependant, il reste à savoir dans quel ordre.
Personnellement, je choisirais Derrick Rose. D’abord parce que un
apport collectif est toujours plus productif qu’un apport individuel et
ensuite parce que à l’image de New Orleans, Utah, Detroit et San
Antonio, il est souvent plus bénéfique de construire une équipe autour
d’un meneur talentueux. Construire une équipe autour de Rose et bâtir
un collectif avec lui sera bien plus aisé qu’avec Beasley.
Néanmoins,
il ne faut pas oublier que Beasley possède le potentiel pour devenir un
joueur vraiment dominant dans la ligue et que son apport statistique
sera immédiat. Laisser passer un tel phénomène serait presque un crime.
Je pense qu’une franchise possédant les moyens d’encadrer le petit
Michael (personnalité du coach et des vétérans) et de le faire évoluer
pourrait le sélectionner sans jamais le regretter.
Cependant, il
ne faut pas réduire Derrick Rose à son apport à l’équipe. Lui aussi
possède le potentiel pour dominer, mais surtout pour dominer
efficacement (c'est-à-dire avec une victoire au bout) et puis sur
l’ensemble du jeu qui plus est.
Aussi, il présente un meilleur
rapport niveau actuel/potentiel car même s’il n’évolue pas du tout, il
restera un meneur très solide. Tandis que Beasley, lui, peut devenir
dans la pire hypothèse un joueur à l’impact négatif (Zach Randolph’s
tribute).
Dans tous les cas, cette cuvée 2008 s’annonce très
prometteuse, et la franchise sur qui le divin doigt de Stern sera tombé
pourra dès à présent se retrousser les manches, nouer une serviette
autour de son cou et prendre rendez-vous avec son médecin pour une
future indigestion de titres.
source: basketsession