Deux ans après leur mémorable premier affrontement à Istanbul, c'est de l'autre côté de la Mer Egée, à Athènes, que Liverpool et le Milan AC se retrouvent mercredi soir pour la finale de la Ligue des champions 2007 (en direct sur notre site à 20h45). Inutile de dire que dans un camp comme dans l'autre, le souvenir de l'incroyable scénario turc, qui avait vu les Reds, menés 0-3 à la pause, revenir à 3-3 en six minutes avant de s'imposer aux tirs au but, est encore bien présent dans toutes les têtes. Retour sur un match pas comme les autres...
Comme un air de déjà vu... Il y a deux ans, pour accéder à la finale de la Ligue des champions, Liverpool avait sorti en demi-finale Chelsea au terme de deux matches accrochés (0-0 puis 1-0), un scénario qui s'est reproduit cette année en encore plus serré, puisque les Reds ont eu recours aux tirs au but pour mettre un terme aux rêves des Blues. Quant au Milan AC, il avait notamment écarté de sa route vers Istanbul Manchester United (en huitièmes de finale), grâce notamment à un succès 1-0 à Old Trafford, comme cette saison, en demi-finale (3-2)...
Et c'est donc Athènes, de l'autre côté de la mer Egée qui sépare la Turquie de la Grèce, qui est le théâtre du deuxième acte de cette pièce dont le premier a été digne de la plus palpitante tragédie grecque. Ce 25 mai 2005 à l'Atatürk Olympic, les Rossoneri frappent d'entrée par leur joueur le plus emblématique, Maldini: dès la première minute de jeu, celui qui pense alors disputer sa dernière finale de C1 reprend victorieusement du droit un coup franc de Pirlo. Les Reds sont sonnés, mais n'ont pas encore tout vu, puisque juste avant la pause, Crespo, en l'espace de cinq minutes, assomme l'équipe anglaise en marquant deux fois, d'abord d'une reprise à bout portant sur un centre parfait de Shevchenko, ensuite d'une pichenette devant Dudek suite à une passe en profondeur de Kaka.
Benitez: "Le problème principal, c'était de leur répondre"3-0, les Milanais affichent au moment de rejoindre les vestiaires la mine réjouie de ceux qui se voient déjà soulever la "Coupe aux grandes oreilles", plongeant l'entraîneur adverse Rafael Benitez, qui passe sa première saison en Angleterre, dans le doute, lui qui sait qu'il va devoir trouver, en anglais, les mots pour remobiliser ses troupes.
"C'était le match le plus important, on était menés 3-0 et là, je devais parler aux joueurs en anglais, c'était vraiment difficile pour moi, se rappelle-t-il sur le site de l'UEFA.
Imaginez-vous, obligé d'exprimer quelque chose dans l'urgence dans une autre langue que la vôtre, en dix ou quinze minutes. Le problème principal n'était d'ailleurs pas de leur dire quelque chose, mais de leur répondre car vous ne comprenez pas toujours ce qu'ils disent, particulièrement les quelques "Scouse" (joueurs originaires de Liverpool, à l'accent prononcé, ndlr)
."La mission de l'ancien coach du FC Valence et de ses protégés s'annonce d'autant plus délicate que, alors que Hamann doit remplacer Traoré, une contrariété de dernière minute s'ajoute aux malheurs des Reds:
"La première chose à faire était de stopper Kaka, c'est pourquoi j'ai demandé à Didi Hamann de rentrer. Après avoir fini mon discours, le physio est venu me voir pour me dire que Finnan ne pouvait plus jouer et que je devais le changer. Traoré était en train de se diriger vers les douches et je lui ai dit:"Djimi, rechange toi, Finnan ne peut plus jouer"
."A leur retour sur la pelouse, les joueurs de Liverpool sont accueillis par les clameurs de la "Red Army" qui n'a jamais cessé de les soutenir en dépit des vents contraires de la première période.
"Quand nous avons concédé le troisième but, c'est devenu tout d'un coup plus difficile, continue Benitez,
mais en entendant les supporters, le message m'a paru clair, nous avions besoin de faire quelque chose pour eux. Nous savions que si nous marquions rapidement, nous pourrions revenir, c'est ce qui s'est passé."Maldini: "Cette finale perdue brûle au fond de moi"Effectivement, neuf minutes suffisent à Gerrard, l'âme de Liverpool, l'alter ego de Maldini, pour, d'une tête lobée, tromper Dida et redonner un peu d'espoir aux Reds (54e). Deux minutes plus tard, c'est Smicer, entré en jeu en milieu de première période à la place de Kewell, blessé, qui d'une frappe de plus de 20 mètres, bat le gardien brésilien, pas irréprochable sur le coup, avant que Xabi Alonso ne transforme en deux temps un penalty consécutif à une faute de Gattuso sur Gerrard.
En six minutes, Liverpool a réussi l'impensable, plus rien ne peut arriver à ces Reds en lévitation, à l'image de Dudek qui, non content de sortir un arrêt miraculeux face à Shevchenko en fin de prolongation, repousse les tirs au but de Pirlo et Shevchenko, faisant chavirer Liverpool dans une ivresse collective qui durera plusieurs jours.
"Jamais nous ne reverrons une telle finale en 100 ans", commente Benitez qui se souvient du désarroi de son vis-à-vis Carlo Ancelotti au moment où il l'avait salué:
"Il avait tout fait pour gagner, il avait vraiment été bon mais nous avons eu un peu de chance. Il doit encore se demander comment il a perdu. En Italie, ils ont dû dire qu'il aurait pu joueur plus défensif en seconde période mais Milan est une équipe de très haut niveau, ils aiment jouer au ballon."Une analyse que balaie d'ailleurs d'une main Ambrosini, qui, blessé, avait suivi cette finale des tribunes:
"Pour être franc, le match était tellement incroyable que même avec dix défenseurs sur le terrain pendant ces dix minutes de folie, cela n'aurait rien changé. Le football peut toujours réserver des surprises et ce match nous l'a une fois de plus prouvé." Deux ans après, cette finale continue de hanter les nuits de certains de ses protagonistes milanais, à l'image de Maldini, qui, lorsqu'on lui demande dans
France Football si ce 25 mai 2005 est un de ses pires souvenirs, répond sans ambages:
"Oui car c'était alors ma dernière et à cause de son déroulement. En général, quand j'ai mérité de gagner, j'ai gagné. Mais cette finale a un peu renversé tout ce que j'avais réussi les années précédentes. Le Milan a tout tenté à Istanbul. Il avait mérité la victoire. Et il a perdu."Inutile de dire que plupart des "Milanistes" de l'époque ne rêvent que d'une chose: effacer ce souvenir par une victoire.
"Cette finale perdue brûle au fond de moi. Je suis persuadé que Liverpool sait qu'un tel dénouement ne se reproduira jamais", confirme Maldini, tandis que son coéquipier Ambrosini conclut:
"Nous devons désormais nous préparer à battre cette équipe de Liverpool qui nous avait subtilisé la Coupe il y a deux ans." Quand on vous dit qu'il y a de la revanche dans l'air...